Renouvellement des autorisations de rejets et de prélèvements
de la centrale nucléaire de Cattenom
Revue sommaire du dossier d’enquête publique – Principales conclusions
8 septembre 2003
Dans le cadre du régime réglementaire applicable aux installations nucléaires françaises, EDF a déposé une demande de renouvellement des autorisations de prélèvement d’eau et de rejets de la centrale de Cattenom, soumise à enquête publique du 25 août au 30 septembre 2003. A la demande de Claude Turmes, député européen, WISE-Paris a procédé à une analyse globale du dossier soumis au public par EDF.
Il ressort de cette analyse que, malgré son imposant volume, le dossier présenté par EDF montre des carences essentielles dans les données mises à disposition du public, dans l’approche méthodologique retenue, et dans l’explication des choix de l’exploitant. En conséquence, la demande d’EDF n’apparaît pas conforme aux obligations d’information du public, de minimisation de l’ensemble des impacts sur l’environnement et de justification de ces impacts, issues notamment de la Directive 85/337 sur l’évaluation d’impact, de la Directive Euratom 96/29 sur la radioprotection, et de la Directive cadre 2000/60/CE sur la politique de l’eau.
• Le dossier présente des données tronquées sur les rejets radioactifs : les rejets de 2001 et 2002 ne sont pas indiqués, alors que ceux-ci – disponibles par ailleurs – montrent des niveaux globalement en hausse, faisant de Cattenom une des centrales françaises les plus polluantes.
• En parallèle, le dossier ne fournit aucune information sur les problèmes très sérieux de ruptures de crayons combustibles rencontrés par Cattenom dès 1999. Ces incidents, causes de l’augmentation des rejets, restent à ce jour incomplètement expliqués. Ils sont probablement liés à l’augmentation des performances de gestion combustibles, dont EDF demande pourtant la poursuite.
• Achevé avant l’été 2003, le dossier apparaît dès sa présentation obsolète dans l’analyse des enjeux des prélèvements d’eau et des rejets thermiques, en ne tenant pas compte de l’épisode caniculaire qui a mis en difficulté de nombreuses centrales françaises et dont la répétition doit être envisagée.
• Pour les rejets radioactifs, les seuils demandés sont différents selon que l’exploitant les considère comme « fatals » (tritium, carbone-14…), ou « maîtrisables ». Si pour les premiers la limite demandée est proche des rejets réels, pour les seconds elle établit une grande marge permetttant d’inclure des rejets accidentels (défaillance des filtrages) dans le cadre du fonctionnement normal.
• De plus, EDF demande une augmentation des rejets en tritium. La comparaison des demandes pour Cattenom avec les autorisations de centrales comparables ayant suivi la même procédure montre des niveaux égaux pour tous les rejets, sauf pour le tritium, où la demande à Cattenom est jusqu’à 66 % plus élevée, sans qu’aucune justification n’y soit apportée.
• L’évaluation d’impact liée aux rejets radioactifs, basée sur un calcul aux valeurs limites plutôt qu’en fonction des rejets réels, ne donne pas une image correcte de l’importance des différents rejets dans l’exposition du public et de son évolution : ainsi, le tritium qui est donné dans le dossier pour 15 % de la dose aux limites, représente en réalité, avec le carbone-14, jusqu’à 95 % de la dose réelle.
• Par ailleurs, l’étude d’impact privilégie généralement l’analyse des impact locaux à court terme aux dépends des impact plus globaux à long terme. Ceci se manifeste notamment dans le choix de calcul de dose individuelle à un « groupe critique » sans calcul en dose collective globale. Il en résulte un danger, dans la pratique de l’exploitant, de transfert de risque des populations locales actuelles vers les populations plus éloignées et/ou les générations futures.
• Enfin, concernant les prélévements d’eau et les rejets thermiques de Cattenom, l’évolution récente montre une tendance à leur augmentation, que pourrait accentuer encore l’évolution du climat. Cette situation, combinée aux autres impacts, est incompatible avec l’objectif communautaire d’amélioration de la qualité globale de la Moselle à horizon 2015. |